Le vicomte de Bragelonne. Tome IV (Дюма) - страница 40

– 87 –


– Très bien, dit celui-ci.


– Venez, mon fils, ajouta le comte en passant doucement le bras autour du cou de Raoul pour l’attirer dans le carrosse, et en l’embrassant encore. Grimaud, poursuivit le comte, tu vas retourner doucement à Paris avec ton cheval et celui de M. du Vallon ; car, Raoul et moi, nous montons à cheval ici, et laissons le carrosse à ces deux messieurs pour rentrer dans Paris ; puis, une fois au logis, tu prendras mes hardes, mes lettres, et tu expédieras le tout chez nous.


– Mais, fit observer Raoul, qui cherchait à faire parler le comte, quand vous reviendrez à Paris, il ne vous restera ni linge ni effets ; ce sera bien incommode.


– Je pense que, d’ici à bien longtemps, Raoul, je ne retournerai à Paris. Le dernier séjour que nous y fîmes ne m’a pas encouragé à en faire d’autres.


Raoul baissa la tête et ne dit plus un mot.


Athos descendit du carrosse, et monta le cheval qui avait amené Porthos et qui sembla fort heureux de l’échange.


On s’était embrassé, on s’était serré les mains, on s’était donné mille témoignages d’éternelle amitié. Porthos avait promis de passer un mois chez Athos à son premier loisir. D’Artagnan promit de mettre à profit son premier congé ; puis, ayant embrassé Raoul pour la dernière fois :


– Mon enfant, dit-il, je t’écrirai.


Il y avait tout dans ces mots de d’Artagnan, qui n’écrivait jamais. Raoul fut touché jusqu’aux larmes. Il s’arracha des mains du mousquetaire et partit.


– 88 –


D’Artagnan rejoignit Porthos dans le carrosse.


– Eh bien ! dit-il, cher ami, en voilà une journée !


– Mais, oui, répliqua Porthos.


– Vous devez être éreinté ?


– Pas trop. Cependant je me coucherai de bonne heure, afin d’être prêt demain.


– Et pourquoi cela ?


– Pardieu ! pour finir ce que j’ai commencé.


– Vous me faites frémir, mon ami ; je vous vois tout effarouché.

Que diable avez-vous commencé qui ne soit pas fini ?


– Écoutez donc, Raoul ne s’est pas battu. Il faut que je me batte, moi !


– Avec qui ?… avec le roi ?


– Comment, avec le roi ? dit Porthos stupéfait.


– Mais oui, grand enfant, avec le roi !


– Je vous assure que c’est avec M. de Saint-Aignan.


– Voilà ce que je voulais vous dire. En vous battant avec ce gentilhomme, c’est contre le roi que vous tirez l’épée.


– Ah ! fit Porthos en écarquillant les yeux, vous en êtes sûr ?


– Pardieu !

– 89 –


– Eh bien ! comment arranger cela, alors ?


– Nous allons tâcher de faire un bon souper, Porthos. La table du capitaine des mousquetaires est agréable. Vous y verrez le beau de Saint-Aignan, et vous boirez à sa santé.