Le vicomte de Bragelonne. Tome IV (Дюма) - страница 39


D’Artagnan, dont les sens veillaient toujours, entendit le trot des chevaux. C’était au moment où Raoul disait à Porthos de dépasser le carrosse, pour voir quelle était la personne qui accompagnait Athos. Porthos obéit, mais il ne put rien voir ; les mantelets étaient baissés.


La colère et l’impatience gagnaient Raoul. Il venait de remarquer ce mystère de la part des compagnons d’Athos, et il se décidait aux extrémités.


D’un autre côté, d’Artagnan avait parfaitement reconnu Porthos

; il avait, sous le cuir des mantelets, reconnu également Raoul, et communiqué au comte le résultat de son observation. Ils voulaient voir si Raoul et Porthos pousseraient les choses au dernier degré.


Cela ne manqua pas. Raoul, le pistolet au poing, fondit sur le premier cheval du carrosse en commandant au cocher d’arrêter.


Porthos saisit le cocher et l’enleva de dessus son siège.


Grimaud tenait déjà la portière du carrosse arrêté.

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Raoul ouvrit ses bras en criant :


– Monsieur le comte ! monsieur le comte !


– Eh bien ! c’est vous, Raoul ? dit Athos ivre de joie.


– Pas mal ! ajouta d’Artagnan avec un éclat de rire.


Et tous deux embrassèrent le jeune homme et Porthos, qui s’étaient emparés d’eux.


– Mon brave Porthos, excellent ami ! s’écria Athos ; toujours vous !


– Il a encore vingt ans ! dit d’Artagnan. Bravo, Porthos !


– Dame ! répondit Porthos un peu confus, nous avons cru que l’on vous arrêtait.


– Tandis que, reprit Athos, il ne s’agissait que d’une promenade dans le carrosse de M. d’Artagnan.


– Nous vous suivons depuis la Bastille, répliqua Raoul avec un ton de soupçon et de reproche.


– Où nous étions allés souper avec ce bon M. de Baisemeaux.

Vous rappelez-vous Baisemeaux, Porthos ?


– Pardieu ! très bien.


– Et nous y avons vu Aramis.


– À la Bastille ?


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– À souper.


– Ah ! s’écria Porthos en respirant.


– Il nous a dit mille choses pour vous.


– Merci !


– Où va Monsieur le comte ? demanda Grimaud que son maître avait déjà récompensé par un sourire.


– Nous allons à Blois, chez nous.


– Comme cela ?… tout droit ?


– Tout droit.


– Sans bagages ?


– Oh ! mon Dieu ! Raoul eût été chargé de m’expédier les miens ou de me les apporter en revenant chez moi s’il y revient.


– Si rien ne l’arrête plus à Paris, dit d’Artagnan avec un regard ferme et tranchant comme l’acier douloureux comme lui, car il rouvrit les blessures du pauvre jeune homme, il fera bien de vous suivre Athos.


– Rien ne m’arrête plus à Paris, dit Raoul.


– Nous partons, alors, répliqua sur-le-champ Athos.


– Et M. d’Artagnan ?


– Oh ! moi, j’accompagnais Athos jusqu’à la barrière seulement, et je reviens avec Porthos.