Le vicomte de Bragelonne. Tome 2 (Дюма) - страница 97

Athos était reparti pour Blois.

Il voulut aller voir M. d'Artagnan.

Mais celui-ci, occupé de l'organisation d'une nouvelle maison militaire du roi, était devenu introuvable.

Bragelonne se rabattit sur de Guiche.

Mais le comte avait avec ses tailleurs et avec Manicamp des conférences qui absorbaient sa journée entière. C'était bien pis avec le duc de Buckingham. Celui-ci achetait chevaux sur chevaux, diamants sur diamants. Tout ce que Paris renferme de brodeuses, de lapidaires, de tailleurs, il l'accaparait.

C'était entre lui et de Guiche un assaut plus ou moins courtois pour le succès duquel le duc voulait dépenser un million, tandis que le maréchal de Grammont avait donné soixante mille livres seulement à de Guiche.

Buckingham riait et dépensait son million. De Guiche soupirait et se fût arraché les cheveux sans les conseils de de Wardes.

– Un million ! répétait tous les jours de Guiche ; j'y succombe-rai. Pourquoi M. le maréchal ne veut-il pas m'avancer ma part de succession ?

– Parce que tu la dévorerais, disait Raoul.

– Eh ! que lui importe ! Si j'en dois mourir, j'en mourrai. Alors je n'aurai plus besoin de rien.

– Mais quelle nécessité de mourir ? disait Raoul.

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– Je ne veux pas être vaincu en élégance par un Anglais.

– Mon cher comte, dit alors Manicamp, l'élégance n'est pas une chose coûteuse, ce n'est qu'une chose difficile.

– Oui, mais les choses difficiles coûtent fort cher, et je n'ai que soixante mille livres.

– Pardieu ! dit de Wardes, tu es bien embarrassé ; dépense autant que Buckingham ; ce n'est que neuf cent quarante mille livres de différence.

– Où les trouver ?

– Fais des dettes.

– J'en ai déjà.

– Raison de plus.

Ces avis finirent par exciter tellement de Guiche, qu'il fit des folies quand Buckingham ne faisait que des dépenses.

Le bruit de ces prodigalités épanouissait la mine de tous les marchands de Paris, et de l'hôtel de Buckingham à l'hôtel de Grammont on rêvait des merveilles.

Pendant ce temps, Madame se reposait, et Bragelonne écrivait à Mlle de La Vallière.

Quatre lettres s'étaient déjà échappées de sa plume, et pas une réponse n'arrivait, lorsque le matin même de la cérémonie du mariage, qui devait avoir lieu au Palais-Royal, dans la chapelle, Raoul, à sa toilette, entendit annoncer par son valet :

– M. de Malicorne.

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« Que me veut ce Malicorne ? » pensa Raoul.

– Faites attendre, dit-il au laquais.

– C'est un monsieur qui vient de Blois, dit le valet.

– Ah ! faites entrer ! s'écria Raoul vivement.

Malicorne entra, beau comme un astre et porteur d'une épée superbe.