Le vicomte de Bragelonne. Tome 2 (Дюма) - страница 77

Tout autour de ces deux tentes et des six autres, une centaine d'officiers, de gentilshommes et de pages reluisaient de soie et d'or, bourdonnant comme des abeilles autour de leur ruche.

Tout cela, l'épée à la hanche, était prêt à obéir à un signe de de Guiche ou de Bragelonne, les deux chefs de l'ambassade. Au moment même où les deux jeunes gens apparaissaient à l'extrémité d'une rue aboutissant sur la place, ils aperçurent, traversant cette même place au galop de son cheval, un jeune gentilhomme d'une merveilleuse élégance. Il fendait la foule des curieux, et, à la vue de ces bâtisses improvisées, il poussa un cri de colère et de désespoir.

C'était Buckingham, Buckingham sorti de sa stupeur pour revêtir un éblouissant costume et pour venir attendre Madame et la reine à l'Hôtel de Ville.

Mais à l'entrée des tentes on lui barra le passage, et force lui fut de s'arrêter.

Buckingham, exaspéré, leva son fouet ; deux officiers lui saisirent le bras.

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Des deux gardiens, un seul était là. De Wardes, monté dans l’intérieur de l'Hôtel de Ville, transmettait quelques ordres donnés par de Guiche.

Au bruit que faisait Buckingham, Manicamp, couché paresseusement sur les coussins d'une des deux tentes d'entrée, se souleva avec sa nonchalance ordinaire, et s'apercevant que le bruit continuait, apparut sous les rideaux.

– Qu'est-ce, dit-il avec douceur, et qui donc mène tout ce grand bruit ?

Le hasard fit qu'au moment où il commençait à parler, le silence venait de renaître, et bien que son accent fût doux et modéré, tout le monde entendit sa question. Buckingham se retourna, regarda ce grand corps maigre et ce visage indolent.

Probablement la personne de notre gentilhomme, vêtu d'ailleurs assez simplement, comme nous l'avons dit, ne lui inspira pas grand respect, car il répondit dédaigneusement :

– Qui êtes-vous, monsieur ?

Manicamp s'appuya au bras d'un énorme chevau-léger, droit comme un pilier de cathédrale, et répondit du même ton tranquille :

– Et vous, monsieur ?

– Moi, je suis milord duc de Buckingham. J'ai loué toutes les maisons qui entourent l'Hôtel de Ville, où j'ai affaire ; or, puisque ces maisons sont louées, elles sont à moi, et puisque je les ai louées pour avoir le passage libre à l'Hôtel de Ville, vous n'avez pas le droit de me fermer ce passage.

– Mais, monsieur, qui vous empêche de passer ? demanda Manicamp.

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– Mais vos sentinelles.

– Parce que vous voulez passer à cheval, monsieur, et que la consigne est de ne laisser passer que les piétons.