Le vicomte de Bragelonne. Tome IV (Дюма) - страница 68


– Ah ! fit Porthos, dont le visage s’illumina de joie ah ! ah !

voici d’Artagnan ! Je vais enfin avoir une idée !


Mouston, à ces mots, se doutant de ce qui se passait derrière lui, s’effaça en souriant tendrement à l’ami de son maître, qui se trouva ainsi débarrassé de l’obstacle matériel qui l’empêchait de parvenir jusqu’à d’Artagnan.


Porthos fit craquer ses genoux robustes en se redressant, et, en deux enjambées, traversant la chambre, se trouva en face de d’Artagnan, qu’il pressa sur son cœur avec une affection qui semblait prendre une nouvelle force dans chaque jour qui s’écoulait.


– Ah ! répéta-t-il, vous êtes toujours le bienvenu, cher ami, mais aujourd’hui, vous êtes mieux venu que jamais.


– Voyons, voyons, on est triste chez vous ? fit d’Artagnan.


Porthos répondit par un regard qui exprimait l’abattement.


– Eh bien ! contez-moi cela, Porthos, mon ami, à moins que ce ne soit un secret.


– D’abord, mon ami, dit Porthos, vous savez que je n’ai pas de secrets pour vous. Voici donc ce qui m’attriste.


– Attendez, Porthos, laissez-moi d’abord me dépêtrer de toute cette litière de drap, de satin et de velours.


– Oh ! marchez, marchez, dit piteusement Porthos : tout cela n’est que rebut.


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– Peste ! du rebut, Porthos, du drap à vingt livres l’aune ! du satin magnifique, du velours royal !


– Vous trouvez donc ces habits ?…


– Splendides, Porthos, splendides ! Je gage que vous seul en France en avez autant, et, en supposant que vous n’en fassiez plus faire un seul, et que vous viviez cent ans, ce qui ne m’étonnerait pas, vous porteriez encore des habits neufs le jour de votre mort, sans avoir besoin de voir le nez d’un seul tailleur, d’aujourd’hui à ce jour-là.


Porthos secoua la tête.


– Voyons, mon ami, dit d’Artagnan, cette mélancolie qui n’est pas dans votre caractère m’effraie. Mon cher Porthos, sortons-en donc : le plus tôt sera le mieux.


– Oui, mon ami, sortons-en, dit Porthos, si toutefois cela est possible.


– Est-ce que vous avez reçu de mauvaises nouvelles de Bracieux, mon ami ?


– Non, on a coupé les bois, et ils ont donné un tiers de produit au-delà de leur estimation.


– Est-ce qu’il y a une fuite dans les étangs de Pierrefonds ?


– Non, mon ami, on les a pêchés, et du superflu de la vente, il y a eu de quoi empoissonner tous les étangs des environs.


– Est-ce que le Vallon se serait éboulé par suite d’un tremblement de terre ?


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– Non, mon ami, au contraire, le tonnerre est tombé à cent pas du château, et a fait jaillir une source à un endroit qui manquait complètement d’eau.