Le vicomte de Bragelonne. Tome 2 (Дюма) - страница 104

– Eh quoi ! tu n'avais pas fait prévenir M. Raoul comme je t'en avais priée ? s'écria Louise.

– Bon ! pour qu'il fit de l'austérité, pour qu'il prononçât des maximes, pour qu'il défît ce que nous avions eu tant de peine à faire ? Ah ! non certes.

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– Je suis donc bien sévère ? demanda Raoul.

– D'ailleurs, fit Montalais, cela me convenait ainsi. Je partais pour Paris, vous n'étiez pas là, Louise pleurait à chaudes larmes ; interprétez cela comme vous voudrez ; j'ai prié mon protecteur, celui qui m'avait fait obtenir mon brevet, d'en demander un pour Louise ; le brevet est venu. Louise est partie pour commander ses habits ; moi, je suis restée en arrière, attendu que j'avais les miens ; j'ai reçu vos lettres, je vous les ai renvoyées en y ajoutant un mot qui vous promettait une surprise. Votre surprise, mon cher monsieur, la voilà ; elle me paraît bonne, ne demandez pas autre chose.

« Allons, monsieur Malicorne, il est temps que nous laissions ces jeunes gens ensemble ; ils ont une foule de choses à se dire ; donnez-moi votre main : j'espère que voilà un grand honneur que l'on vous fait, monsieur Malicorne.

– Pardon, mademoiselle, dit Raoul en arrêtant la folle jeune fille et en donnant à ses paroles une intonation dont la gravité contrastait avec celles de Montalais ; pardon, mais pourrais-je savoir le nom de ce protecteur ? Car si l'on vous protège, vous, mademoiselle, et avec toutes sortes de raisons…

Raoul s'inclina :

– … je ne vois pas les mêmes raisons pour que Mlle de La Vallière soit protégée.

– Mon Dieu ! monsieur Raoul, dit naïvement Louise, la chose est bien simple, et je ne vois pas pourquoi je ne vous le dirais pas moi-même… Mon protecteur, c'est M. Malicorne.

Raoul resta un instant stupéfait, se demandant si l'on se jouait de lui ; puis il se retourna pour interpeller Malicorne.

Mais celui-ci était déjà loin, entraîné qu'il était par Montalais.

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Mlle de La Vallière fit un mouvement pour suivre son amie ; mais Raoul la retint avec une douce autorité.

– Je vous en supplie, Louise, dit-il, un mot.

– Mais, monsieur Raoul, dit Louise toute rougissante, nous sommes seuls… Tout le monde est parti… On va s'inquiéter, nous chercher.

– Ne craignez rien, dit le jeune homme en souriant, nous ne sommes ni l'un ni l'autre des personnages assez importants pour que notre absence se remarque.

– Mais mon service, monsieur Raoul ?

– Tranquillisez-vous, mademoiselle, je connais les usages de la cour ; votre service ne doit commencer que demain ; il vous reste donc quelques minutes, pendant lesquelles vous pouvez me donner l'éclaircissement que je vais avoir l'honneur de vous demander.