Le vicomte de Bragelonne. Tome IV (Дюма) - страница 4


– Ah ! dit le roi avec une certaine hauteur, c’est une plainte que vous venez formuler ici ?


– Ce ne serait une plainte, reprit Athos, que si Votre Majesté…

Mais, veuillez m’excuser, Sire, je vais reprendre l’entretien à son début.


– J’attends.


– Le roi se souvient qu’à l’époque du départ de

M. de Buckingham, j’ai eu l’honneur de l’entretenir.


– À cette époque, à peu près… Oui, je me le rappelle ; seulement, le sujet de l’entretien… je l’ai oublié.


Athos tressaillit.


– J’aurai l’honneur de le rappeler au roi, dit-il. Il s’agissait d’une demande que je venais adresser à Votre Majesté, touchant le mariage que voulait contracter M. de Bragelonne avec Mlle de La Vallière.


– Nous y voici, pensa le roi. Je me souviens, dit-il tout haut.

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– À cette époque, poursuivit Athos, le roi fut si bon et si généreux envers moi et M. de Bragelonne, que pas un des mots prononcés par Sa Majesté ne m’est sorti de la mémoire.


– Et ?… fit le roi.


– Et le roi, à qui je demandais Mlle de La Vallière pour M. de Bragelonne, me refusa.


– C’est vrai, dit sèchement Louis.


– En alléguant, se hâta de dire Athos, que la fiancée n’avait pas d’état dans le monde.


Louis se contraignit pour écouter patiemment.


– Que… ajouta Athos, elle avait peu de fortune.


Le roi s’enfonça dans son fauteuil.


– Peu de naissance.


Nouvelle impatience du roi.


– Et peu de beauté, ajouta encore impitoyablement Athos.


Ce dernier trait, enfoncé dans le cœur de l’amant le fit bondir hors mesure.


– Monsieur, dit-il, voilà une bien bonne mémoire !


– C’est toujours ce qui m’arrive quand j’ai l’honneur si grand d’un entretien avec le roi, repartit le comte sans se troubler.


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– Enfin, j’ai dit tout cela, soit !


– Et j’en ai beaucoup remercié Votre Majesté, Sire, parce que ces paroles témoignaient d’un intérêt bien honorable pour M. de Bragelonne.


– Vous vous rappelez aussi, dit le roi en pesant sur ces paroles, que vous aviez pour ce mariage une grande répugnance ?


– C’est vrai, Sire.


– Et que vous faisiez la demande à contrecœur ?


– Oui, Votre Majesté.


– Enfin, je me rappelle aussi, car j’ai une mémoire presque aussi bonne que la vôtre, je me rappelle, dis-je, que vous avez dit ces paroles : « Je ne crois pas à l’amour de Mlle de La Vallière pour M. de Bragelonne. » Est-ce vrai ?


Athos sentit le coup, il ne recula pas.


– Sire, dit-il, j’en ai déjà demandé pardon à Votre Majesté, mais il est certaines choses dans cet entretien qui ne seront intelligibles qu’au dénouement.


– Voyons le dénouement, alors.


– Le voici. Votre Majesté avait dit qu’elle différait le mariage pour le bien de M. de Bragelonne.